Photos Michel Lefrancq
Photographe surréaliste (1916-1974)
1890 - 1930
L'ancêtre des diapositives

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Données techniques
Matériel d'occasion








Musée Duesberg Mons
Jacques Du Broeucq
1505 - 1584










Textes sur les grands photographes présentés au club

 

Bill Brandt


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Je conseille de lire le texte avant (ou en même temps) de regarder la présentation. Celle-ci n'est en effet pas commentée.

De son vrai nom Hermann Wilhelm Brandt, Bill Brandt est un photographe anglais né à Hambourg en 1904 d'un père banquier, lui‐même né à Londres de parents allemands.

Le jeune Hermann a passé toute son enfance à Hambourg sous la férule d'un père autoritaire, il a fait ses études au Gymnasium (équivalent allemand de l'école moyenne, que l'on fréquente de 11 à 18 ans) à Hambourg puis Elmshorn, à une trentaine de kilomètres, éloigné de la métropole probablement à cause de la guerre. Il est mal vu de ses condisciple car trop différent d'eux, seul pensionnaire et considéré comme "Anglais". C'est peut‐être là qu'il aurait contracté la tuberculose.

De 1924 à 1927 il séjournera dans un sanatorium à Davos, puis il s'installe à Vienne pour poursuivre son traitement et entame une psychanalyse auprès d'un disciple de Freud. Il fréquente Eugénie Schwarzwald, une pédagogue qui l'introduit dans les milieux littéraires et d'avant‐garde viennois. C'est elle qui l'incitera à entreprendre des études de photographie auprès d'une photographe professionnelle. Ce séjour viennois lui permettra de s'éloigner progressivement de son éducation germanique rigoriste grâce notamment à la rencontre de personnalités telles que Oskar Kokoschka, Arnold Schoenberg ou Robert Musil. Il réalise un portrait du poète Ezra Pound lors d'une de ses visite chez Eugénie Schwarzwald, et c'est Pound qui l'introduira auprès de Man Ray par la suite. Il rejettera complètement son héritage allemand et optera plus tard pour la nationalité britannique.

À Paris à partir de 1929, il travaille quelques mois comme assistant de Man Ray, rencontre Brassaï, avec qui il nouera des liens d'amitiés durables, et les surréalistes, André Breton, René Crevel, le peintre Balthus, l'avant‐garde parisienne. Il arpente les rues de Paris avec son appareil photographique, suivant les traces d'Eugène Atget. Il y avait à ce moment deux grandes tendances dans la photographie : l'école poétique, dont Man Ray et Edward Weston étaient les chefs de file, et l'école du "moment de vérité", de "l'instant photographique" de Henri Cartier‐Bresson. Bill Brandt est également attiré par les deux.

Il quitte Paris pour Londres en 1931 où il devient photojournaliste et s'attache à une description des contrastes sociaux extrêmes de l'Angleterre. Il fait aussi des reportages dans les régions industrielles et minières du nord de l'Angleterre durant la dépression. Pendant la guerre il réalisera de nombreuses photos de nuit dans les rues de Londres privées d'éclairage public et un reportage sur la vie dans les abris antiaériens lors des alertes nocturnes, notamment dans le métro et certaines cryptes d'églises.

Son oeuvre, qu'elle soit documentaire ou non, est fortement influencée par ses expériences de jeunesse à Vienne ou Paris, par sa rencontre avec la psychanalyse et des artistes d'avant‐garde, ainsi, il le dira lui‐même, que par le cinéma d'Alfred Hitchcock et surtout d'Orson Welles dans son "Citizen Kane".

Ses tirages sont très travaillés, il aime les contrastes forts, les ambiances sombres. Il recadre, retouche, n'hésite pas à mettre en scène ; dans le cas de paysage il revient sur le sujet si la lumière ne lui convient pas à la première visite. Son maître mot est atmosphère : "C'est ainsi que j'ai trouvé, grâce à "l'atmosphère", la formule magique qui pouvait donner de la beauté à un sujet banal. Et pourtant, je ne suis pas sûr de savoir en quoi consiste l'atmosphère. Je serais bien en peine de la définir, je sais simplement qu'elle associe plusieurs éléments, décrits de manière simple et cependant inadéquate, dans des termes techniques tels que l'éclairage ou le point de vue, qui révèlent le sujet sous un jour familier mais néanmoins étrange. Je doute que l'atmosphère, au sens où j'entends ce mot, puisse être obtenue par la photographie d'un sujet étranger à celui qui le regarde."

Après la guerre, son intérêt pour le reportage social s'atténue et il se consacre à une photographie poétique qui était sa tendance des débuts à Paris. Il a trouvé dans un magasin d'occasion un boîtier Kodak qui avait près de 70 ans d'âge, sans obturateur, avec un objectif grand angle et une ouverture minuscule, réglé sur l'infini. "Je crois que j'ai alors compris ce qu'Orson Welles voulait dire lorsqu'il déclarait : 'La caméra est bien plus qu'un appareil d'enregistrement. C'est un medium à travers lequel des messages d'un autre monde parviennent jusqu'à nous." C'est l'appareil qu'il utilisera dès lors pour ses photos de nus et ses paysages. Ce n'est que bien plus tard qu'il fera l'acquisition d'un Hasselblad avec un très grand angle et abandonnera sa vieille chambre lourde et encombrante.

Ces photos de nus aux distorsions importantes seront dès l'abord rejetées par une grande majorité de spectateurs et par les éditeurs, on dira dans la presse que ces images étaient tellement affreuses que leur auteur cherchait probablement à monter une escroquerie photographique.

La reconnaissance viendra pourtant assez rapidement, et Bill Brandt est encore maintenant considéré comme un des plus grands photographes anglais, autant pour ses reportages sociaux que pour ses paysages et ses études de nu.

Il meurt à Londres en 1983.

Présenté au Photo-Club le 7 avril 2011